Dans la nuit des formes

2 mai 2025 – 7 juin 2025

Vernissage le vendredi 2 mai à partir de 18h

Artiste: ZHOU Meng

Curateur: Henri Guette

Les dessins semblent s’animer dans le noir. Un pas après l’autre, on entre dans la nuit, on s’enfonce dans la galerie où se plient géographie et chronologie. Les œuvres se fondent dans les murs comme des gestes immémoriaux. On ignore bien des choses de la préhistoire, cette période si longue d’avant l’écriture. La simple grotte de Chauvet condense à elle seule, entre la première antichambre et la chambre la plus profonde, plusieurs millénaires. Ce vertige se double encore quand d’un continent à l’autre certains motifs se dédoublent.

Les œuvres de ZHOU Meng semblent appartenir à une époque lointaine qui est en même temps extrêmement contemporaine, un là-bas si proche d’ici. Elles entretiennent des questions jamais élucidées. Quel pouvait bien être le rôle de la peinture pariétale ? Qui étaient donc, homme ou femme, ces peintres et quels rituels entouraient donc leurs pratiques ? L’artiste entretient un doute en dessinant des figures à la fois extrêmement simples et très caractéristiques sur des supports qui tantôt rappellent la pierre, tantôt sont de véritables météorites. Ses figures semblent danser avec les étoiles et la part de récit prend le pas sur la recherche de véracité.

Dans ce mouvement qu’il retranscrit, il rejoue le trouble qui vient la première fois que l’on se rend compte de la petitesse de l’humain dans le cosmos. Le chercheur Edward Wachtel émettait l’hypothèse, dans son essai “The First Picture Show”, qu’il se jouait dans les grottes peut-être la première forme de cinéma. Les gestes pour projeter la peinture, dessiner des figures avec de la cendre à la lumière du feu étaient des gestes d’animation. La peinture vibrait et se mouvait en même temps qu’on la recouvrait. Meng Zhou cherche avec la répétition et la variation tout ce qui se joue dans le premier geste. Ses œuvres ont ainsi la forme, dans la nuit, de tout ce qui n’a pas de réponse.

La curiosité est sans doute le premier moteur de l’artiste. Pourquoi au fond y-a-t-il quelque chose plutôt que rien ? Et dans ce quelque chose, cette vie qui grouille, des êtres humains ? Cette façon de diriger les questions participe d’un sens de l’émerveillement, d’une enfance de l’art qui de Matisse à Picasso en passant par Klee a porté toutes les recherches de l’art moderne. Par delà nature et culture, ZHOU Meng donne à sentir par des formes, des lignes, les fluides, énergies et puissances invisibles que les mythes ont cherché à cerner, identifier.

La reprise de fragments que l’on peut assimiler à des cultures anciennes ou à des fossiles permet une métamorphose continue, la reformulation d’un récit du temps, l’affirmation d’un cycle d’une pierre à la pierre (From a Stone to the Stone). L’artiste travaille aussi bien avec des techniques traditionnelles qu’avec les technologies les plus récentes. Ses gestes qui touchent parfois à la restauration, parfois à l’inscription, souvent à l’assemblage entrent dans une compréhension de la matière qui se nourrit d’accidents et de sérendipité. Chaque pièce raconte une part d’histoire différente et la façon dont l’artiste pense à leur exposition n’est pas loin de la constellation et même de jour, elles nous accompagnent.

 

Texte par Henri Guette

ARTISTE|ZHOU Meng

En tant qu’artiste/observateur, La pensée de ZHOU Meng se construit autour de la dialectique entre la transition et de la transformation de l’écologie naturelle et de l’héritage humain. Il visualise le processus de la réflexion discursive à travers différents médiums tels que l’installation, la vidéo, la peinture et la sculpture, afin d’explorer nos responsabilités ou obligations en tant qu’êtres humains face à la culture et à la nature.

Son processus de création naît généralement d’une curiosité pour la nature et pour toutes les matières connues du monde. Il restaure, assemble et polit les fossiles et les fragments à travers des savoir-faire traditionnels ou des techniques contemporains. Les accidents et les moments de sérendipité guident toujours ses créations. Il considère chaque contact avec la matière comme un voyage de métamorphose, et non seulement une simple transformation de forme matérielle ; chaque strate de l’œuvre enregistre la température et la texture d’une histoire différente. Il prend en compte de son travail comme un médium et un pont pour ouvrir une scène immersive mais fictionnelle, dans laquelle il construit la relation entre l’humain et son environnement — à la fois dépendante et subversive.

En parallèle, il copie, colle et édite le monde des rêves et il extrait des fragments de mythes, permettant au spectateur de voyager entre le virtuel et le réel, entre le monde intérieur spirituel et le monde extérieur matériel.

Ces dernières années, il s’est inspiré des mythes, des environnements naturels et des folklores de différentes régions, en représentant des traces plus ou moins altérées par diverses cultures dominantes. En tant qu’êtres humains, nous avons hérité depuis toujours de l’infinie richesse et des dons de l’histoire, et ce sont les esprits de ces sages, ayant transcendé le quotidien tout en partageant le monde, qui l’ont toujours inspiré et guidé. Face à la situation globale actuelle et aux vies individuelles, il est essentiel de rester lucide pour reconnaître où nous nous situons aujourd’hui au milieu de tous ces conflits.

Education
2016-2018 MA Moving image, Royal College of Arts, London, UK
2013-2016 BA Painting, Camberwell College of Arts, London, UK

Solo Exhibition
2025 Zhejiang Art Museum, CN
2025 Espace Temps, Paris, FR
2024 II Trovatore, BMCA, Munich, DE
2024 Vacuum, R Plus, Hangzhou, CN
2023 Incomplete Wonder,Nan Ke Gallery, Shanghai, CN
2018 Bafeng, Liangshe China, Shanghai, CN
2017 Overtone, Art Night, St George in the East, London, UK

Curateur|Henri Guette

Critique d’art et commissaire d’exposition, Henri Guette arrive à l’art contemporain en s’intéressant à la poésie contemporaine et plus précisément au rapport de Charles Pennequin à la performance. Membre de C-E-A et de l’AICA, il travaille par le prisme de la littérature en accordant aux languages et aux récits une attention particulière. Diplômé du Master «L’art contemporain et son exposition» (Paris IV), il développe un travail de recherche sur les liens entre art et littérature qu’il donne à voir à l’écrit ou en podcast avec Jeunes Critiques d’art et l’émission «En Pleines Formes». Passé par différents postes comme chargé de programmation littéraire pour le FILAF, chargé de projets culturels pour l’Université de Lille où il coordonnait les résidences artistiques et une partie de la programmation, il développe aujourd’hui son activité de commissaire d’exposition au sein de l’association Fernrohr, en travaillant à l’adaptation d’un cycle de romans de Jules Verne parmi lesquels Le Rayon vert qui lui permettent d’utiliser la fiction comme un espace de rencontres.

Aperçu de l’exposition