Exposition
Et le souffle devient signe
19 septembre – 31 octobre 2024
Vernissage le jeudi 3 octobre à partir de 18h
ARTISTES :
François CHENG | Henri MICHAUX | Mark TOBEY | CHEN Zhen | YANG Jiechang | Yangjiang Group | HE An | SHEN Wei | Charwei TSAI
CURATEURS :
Martina Köppel-Yang | Joseph CUI
Et le souffle devient signe
L’exposition « Et le souffle devient signe » réunit des œuvres utilisant l’écriture et le processus d’écrire de neuf artistes modernes et contemporains, aussi divers que François Cheng, Henri Michaux, Mark Tobey, Chen Zhen, Yang Jiechang, Zheng Guogu and Yangjiang Group, He An, Shen Wei, ou encore Tsai Charwei.
Le titre de l’exposition est inspiré de celui d’un livre de François Cheng (1929- ). Dans ce livre, Cheng décrit sa pratique calligraphique avec des expressions telles que « le pouvoir imaginaire des signes », « un lien avec l’univers », « pulveriser l’absurde » en faisant allusion à la tradition chinoise, dans laquelle la calligraphie, comme la poésie, la musique et la peinture, est considérée comme « une émanation du cœur ». Dans la modernité occidentale l’écriture et le processus d’écrire sont également perçus comme un moyen d’accéder à l’inconscient. Comme disait Henri Michaux (1899 – 1984) « … Qui n’a voulu un jour saisir plus, saisir mieux, saisir autrement, et les êtres et les choses, pas avec des mots, ni avec des phonèmes, ni avec des onomatopées, mais avec des signes graphiques ? » La calligraphie chinoise, dans laquelle écriture et image ne font qu’un, mais aussi la calligraphie arabe, qui reposent toutes deux sur la qualité de fluidité de l’encre et du pinceau, permettant ainsi spontanéité et rapidité d’exécution, ont inspiré nombreux artistes de la génération de Cheng, Michaux et Tobey (1890 – 1976), ce précurseur de l’informel. Le dessin à l’encre et l’écriture automatique, comme dans les « White Writings » de Tobey, sont vus comme une pratique libératrice, dépassant le sens direct des mots et ouvrant la voie vers une sorte de langage universel. Selon Tobey, la peinture devrait passer par l’approche de la méditation plutôt que par l’action et créer un espace intérieur. L’œuvre témoigne de l’énergie vitale et transcrit la connexion de tout avec tout le reste. Comme dans la tradition chinoise, il s’agit de la résonance, de la résonance spirituelle.
Pour les artistes contemporains, l’écriture et le dessin portent en eux un potentiel d’action et de participation. Avec leurs œuvres ils reconquièrent l’espace extérieur. Les œuvres de Chen Zhen (1955-2000), He An (1971) et Yang Jiechang (1956) parlent d’une sorte de spiritualité pragmatique, ancrée dans l’ici et le maintenant. Pour eux, le texte et le processus d’écrire sont des outils essentiels permettant de réagir au moment d’intervenir. Les mots deviennent les protagonistes centraux de leurs œuvres. He An réutilise des enseignes aux néons qu’il récupère ou vole dans l’espace publique et en crée des sculptures lumineuses. À partir de ces idéogrammes volés et souvent endommagés, l’artiste recrée les noms de personnes qui lui sont chères ou des phrases qui l’inspirent. La vidéo OOh (2023) de Yang Jiechang, montrant l’artiste en écrivant et en prononçant cette exclamation. Yang a créé Ooh pendant le confinement dû à la pandémie de Covid. Sa vidéo est une sorte de litanie de bon augure. Ces œuvres, comme les dessins de Chen Zhen, encouragent le spectateur non seulement à s’engager dans l’acte de lire, mais aussi à devenir des agents actifs dans un nouveau champ de concepts et d’énergies.
Shen Wei (1968), Tsai Charwei (1980) ainsi que Zheng Guogu et Yangjiang Group (Chen Zaiyan (1971), Sun Qinglin (1974), Zheng Guoogu (1971), utilisent l’écriture dans le cadre d’un processus multidisciplinaire et ludique. Pour Shen Wei, chorégraphe et danseur de formation, l’énergie est au début du processus créatif. Cette énergie s’exprime à travers des mouvements corporels chorégraphiés, qui sont ensuite retranscrits sur toile en réponse au stimuli auditifs. Tsai Charwei écrit des textes, souvent bouddhistes, sur des objets naturels, comme la pierre, des coquillages, du bois ou des champignons. Dans ses œuvres souvent éphémères, le mot écrit forme ainsi un lien spirituel et énergétique entre la sphère humaine et la nature. L’implication ludique des pratiques traditionnelles est présente dans les oeuvres du Yangjiang Group. Leur After Dinner Calligraphy (depuis 2012) est une série de photographies qui documentent des performances de calligraphie et de peinture utilisant de l’encre mais aussi des restes d’un dîner. After Dinner Calligraphy est une renaissance des réunions traditionnelles des lettrés chinois sous toutes leurs facettes, avec sa sobriété, sa gaieté et son ingéniosité.
L’ensemble des positions artistiques si divers réunis dans cette exposition montre ce « pouvoir imaginaire des signes » dont parle François Cheng.
Texte par Martina Köppel-Yang
CURATEURS
Martina Köppel-Yang
Martina Köppel-Yang est sinologue, historienne de l’art et curatrice. Elle travaille dans le domaine de l’art contemporain chinois depuis le milieu des années 1980. Sa recherche se concentre sur les stratégies artistiques et la politique culturelle de la Chine. Sa monographie Semiotic Warfare – The Chinese Avant-garde 1979 – 1989, a Semiotic Analysis (Hong Kong : timezone8, 2003) est un ouvrage de référence sur l’art chinois des années 1980.
Joseph Cui
Joseph Cui, directeur de l’espace temps, curateur et chercheur. Arrivé en 2002 à Paris, il est diplômé en théologie et en philosophie de l’Ecole des Bernardins et en littérature comparée à la Sorbonne Nouvelle. En tant que chercheur, son domaine d’étude comprend un siècle d’artistes chinois en France, du début du 20ème siècle, jusqu’à la génération actuelle. Proche de François Cheng, il commence à constituer l’archive des artistes chinois en France et tente une analyse du phénomène transculturel de leurs créations artistiques.
ARTISTE
François CHENG
François CHENG, né en 1929 à Nanchang (province du Jiangxi, Chine), est un écrivain, poète et calligraphe français d’origine chinoise. Il a été naturalisé français en 1971. Il est membre de l’Académie française depuis 2002.
Ses travaux se composent de traductions des poètes français en chinois et des poètes chinois en français, d’essais sur la pensée et l’esthétique chinoises, de monographies consacrées à l’art chinois, de recueils de poésies, de romans et d’un album de ses propres calligraphies.
Henri MICHAUX
Henri Michaux (1899-1984), né à Namur et élevé à Bruxelles, fut un écrivain et artiste d’origine belge. Après des études médicales abandonnées, il s’engage comme matelot et découvre la littérature en lisant Lautréamont. Installé à Paris, il se lie d’amitié avec des figures littéraires comme Jules Supervielle et explore divers genres d’écriture, de la poésie aux récits de voyages. Fasciné par la peinture dès 1925, il combine écriture et arts graphiques. Michaux est également connu pour ses expériences avec les drogues psychotropes, notamment la mescaline, qu’il a explorées scientifiquement dans ses œuvres.
Mark TOBEY
Mark Tobey (1890-1976) est un peintre abstrait américain connu pour son style unique de « White Writing”. Après avoir étudié à l’Institut d’art de Chicago, Mark Tobey travaille à New York comme portraitiste et dessinateur de mode. Converti à la foi baha’ie en 1918, il entreprend de nombreux voyages en Europe, au Moyen-Orient et en Asie, où il s’initie à la calligraphie chinoise et japonaise. Dès 1935, il développe une peinture méditative caractérisée par un fourmillement de signes, influencée par la calligraphie et l’esthétique zen. Ses œuvres, qui ont marqué des artistes comme Jackson Pollock, lui valent de nombreux prix.
CHEN Zhen
Chen Zhen(1955-2000)est un artiste-plasticien chinois. Plaçant le corps, la maladie et la médecine chinoise au cœur de son travail, Chen Zhen a exploré, tout au long de sa vie, les relations entre matière et esprit, collectif et individu, intériorité et extériorité. Issu d’une famille de médecins maîtrisant aussi bien l’anglais que le français, il s’est attaché, par le biais de son œuvre, à connecter la pensée chinoise traditionnelle à la culture occidentale. À travers ses créations, et notamment ses installations singulièrement composites, Chen Zhen a forgé des liens philosophiques et sensibles, unissant la modernité occidentale aux traditions d’une Chine confucéenne et maoïste.
YANG Jiechang
Yang Jiechang est un artiste contemporain chinois, né en 1956 à Guangdong , il vit et travaille à Paris et à Heidelberg. Il formé dès l’enfance à la calligraphie et la peinture traditionnelle chinoise, est diplômé de l’Académie des beaux-arts de Guangzhou. Invité à exposer au Centre Pompidou en 1989, il s’installe définitivement en France. Il est reconnu pour ses œuvres mêlant couches d’encre, céramique et sculpture, explorant les bouleversements politiques et philosophiques.
ZHENG Guogu & Yangjiang Group
Le Yangjiang Group est un collectif d’artistes chinois fondé en 2002 par Zheng Guogu (1970-), Chen Zaiyan (1971-) et Sun Qinglin (1974-). Le nom du groupe provient de leur ville natale. Leur travail, principalement axé sur la calligraphie, mais utilisant aussi la vidéo et la sculpture, se caractérise par une approche apolitique et non figurative, avec un intérêt pour l’expérience directe du public. Inspirés par les traditions artistiques chinoises, ils explorent les liens entre art, vie quotidienne et espace. Le collectif critique également la marchandisation de l’art et cherche à promouvoir la scène artistique locale du sud de la Chine, loin des centres de Pékin et Shanghai.
HE An
He An, né en 1970 à Wuhan, Chine, vit et travaille à Pékin. He An transforme des néons en un paysage visuel et émotionnel unique, capturant l’atmosphère des villes chinoises. Parfois obtenus via la scène underground de Wuhan, ses œuvres sont des poèmes lumineux, mêlant déclarations d’amour et tristesse. En détournant l’usage commercial du néon, il y insuffle sa vie personnelle, créant des objets de mémoire et de consolation, tels des mausolées contemporains.
SHEN Wei
Shen Wei est un chorégraphe, peintre et directeur sino-américain basé à New York, reconnu pour sa vision interculturelle et interdisciplinaire de la performance. En 2000, il fonde Shen Wei Dance Arts, créant des œuvres alliant danse, peinture, son et vidéo, tout en développant sa propre technique de danse, appelée « développement naturel du corps ». Il a été commandité pour des événements majeurs comme les Jeux olympiques de Pékin en 2008 et a reçu plusieurs distinctions, dont le prix MacArthur et le prix Samuel H. Scripps pour l’ensemble de sa carrière en chorégraphie.
Charwei TSAI
Charwei Tsai, née à Taipei en 1980, est une artiste taïwanaise diplômée en design industriel et histoire de l’art. Elle s’inspire des récits de migration tibétaine et du mouvement Fluxus pour créer des œuvres pluridisciplinaires. Sa pratique artistique, influencée par l’exil et la spiritualité, explore des thèmes personnels et universels, intégrant des motifs géographiques, sociaux et spirituels. Elle invite le spectateur à participer activement, méditant sur les relations entre l’homme, la nature et la fugacité.
Partenaires et collaborateurs
Association Les voies de l’art
L’association Les voies de l’art succède à l’association VIA Paris (depuis 2013). Dans le but de créer un nouvel élan, nous avons décidé de rassembler nos ressources, de nous installer dans un local permanent (espace temps), et de nous initier cette nouvelle identité : Les voies de l’art (donné par François Cheng). Ce nouveau dispositif nous permettra de bâtir un lieu de rencontre, de construire des projets plus qualitatifs, pertinents et réguliers. L’Association Les voies de l’art poursuit la mission de promouvoir les échanges interculturels et d’œuvrer dans le sillage de l’académicien M. François Cheng, qui a toujours expérimenté et recherché la collision artistique entre différentes cultures.
DSL Collection
La DSL Collection a été créée en 2005 par Sylvain et Dominique Levy, et Karen Levy participe également activement à son développement. La collection se concentre sur l’art contemporain chinois, avec un maximum de 350 œuvres, regroupant les créations de 200 artistes chinois contemporains. Ce qui distingue la DSL Collection est son concept strict de collecte et son utilisation des nouvelles technologies, telles que les expositions virtuelles et les livres électroniques. La collection promeut la découverte de l’art chinois contemporain tout en favorisant l’ouverture, le partage et une approche nomade de la culture.
La Galerie Jeanne Bucher
La galerie, fondée en 1925 par Jeanne Bucher, a été l’un des foyers artistiques parisiens les plus vivants entre la période faste du milieu des années 1920 et la fin de la seconde guerre mondiale, présentant sans concession tous les courants qu’ils soient cubistes, post-cubistes, surréalistes, naïfs ou abstraits.